Historique/Géographie/Climat

HISTORIQUE

Données géographiques

Le chef-lieu de canton, à 15 km environ au nord-ouest de Sélestat, s’est établi au point stratégique du val de Villé, c’est-à-dire à la jonction de l’avant-vallée, large et aérée, et des deux vallées supérieures qui mènent aux cols de Steige (vers la haute vallée de la Bruche) et d’Urbeis (vers le bassin de Saint-Dié). Le chef-lieu, jadis fortifié, contrôle ainsi les passages entre la plaine d’Alsace et la Lorraine.

 

Le bourg, situé à une altitude d’environ 275 m, s’est installé entre le Giessen d’Urbeis et le Giessen de Steige, peu avant le confluent des deux rivières dont les eaux épousent partiellement le tracé des anciennes fortifications. L’agglomération s’est développée le long des voies de communications qui rayonnent du centre, ainsi que sur les coteaux environnants recherchés pour la beauté du site (Schrann, Luttenbach).

Rencontre des deux Giessen à Villé (67)
Rencontre des deux Giessen à Villé (67)
Survol historique

Villé est campé au cœur de la vallée Albertine (l’Albrechtstal), au confluent du Giessen d’Urbeis et du Giessen de Steige. La localité se situe à la bifurcation de l’antique Route du Sel et du chemin de Saint-Dié par le col d’Urbeis. En position stratégique, le bourg commande ainsi l’accès aux deux vallées supérieures et à leur col. Cette situation a peut-être conféré à Villé un rôle important dès le Haut Moyen-Âge. Le village s’est probablement formé autour d’une « cour » carolingienne prenant le relais d’une occupation gallo-romaine établie sur la route évoquée plus haut.

 

Les premières mentions du lieu ne sont guère fiables ; toutes figurent dans de fausses chartes, comme l’acte de 1120 du pape Calixte II confirmant, pour les besoins du faussaire ou de son commanditaire, la donation faite par Adélaïde, nièce de Werner de Hurningen (fondateur de l’Abbaye de Honcourt), de l’église, des rentes et dîmes de Villé.

 

Le centre historique du bourg se situe probablement sur la butte portant l’actuel presbytère. A ses pieds, se trouvent l’église et l’ancien cimetière fortifié, entourés d’un profond fossé comblé au 18e siècle lors de la reconstruction de l’église. Ce quartier est aujourd’hui encore connu sous l’appellation de « Schloessel » (le petit château). La tradition populaire veut qu’un castel y ait été implanté, résidence des Hurningen-Hohenberg-Ortenberg avant la construction du château d’Ortenberg (1264). Aucune preuve historique ou archéologique ne peut toutefois sérieusement étayer cette hypothèse.

 

Le bourg, ayant acquis une certaine importance, est doté d’une enceinte portant 9 tours. La première mention de ces fortifications date de 1471. Il est possible toutefois qu’elles soient beaucoup plus anciennes (certains auteurs avancent – sans preuve – les dates de 1290 ou de 1330). Les trois quarts du fossé sont directement constitués par les lits des deux Giessen d’Urbeis et de Steige. On accède à l’intérieur des murs par l’Obertor (porte de Bassemberg ou porte haute, démolie en 1814) et l’Untertor (porte du faubourg ou porte basse, rasée en 1857, dont le clocheton domine à présent la chapelle du cimetière de Villé). De ces fortifications ne subsistent aujourd’hui que de rares pans de murs et l’ancienne « prison », rue de l’Abattoir.

 

Le terrier des Habsbourg établi en 1303 par Von Fricke, relève les contributions versées par la localité. Y figurent par exemple 40 chapons et 5 livres de poivre que le bourg prélève sur les épiciers et marchands. On peut supposer que Villé possède déjà le statut de « Marktflecken » (place de marché). Corvées diverses (entretien de l’ancienne Route du Sel) et dîmes versées à Honcourt grèvent également les revenus.

 

L’administration communale revient au « Meier » (du latin major), fonctionnaire seigneurial. Villé en compte deux : le premier a autorité sur la partie supérieure de l’Albrechtstal (de Saint-Martin à Colroy), le second sur la vallée inférieure (de Triembach à Urbeis). Les « Meier » président notamment les réunions des bourgeois et organisent l’élection des fonctionnaires communaux et des sept échevins (Schoeffen ou Sybner).

 

Le tribunal de Villé veille à l’observation du droit coutumier, plus tard à celui du « Fleckenrecht ». L’existence d’un gibet (Galgen) qui a donné son nom à un lieu-dit (Galgenrain) peut laisser supposer qu’on exerce également la haute justice. Celle-ci n’est toutefois pas du ressort du tribunal de Villé, mais plutôt de celui du bailli (Vogt) de l’Ortenberg, siégeant avec quelques assesseurs pris dans les localités de la seigneurie.

 

L’histoire de Villé est jalonnée par plusieurs épisodes militaires qui, à défaut d’être scrupuleusement attestés par les archives, figurent dans la mémoire collective ou la tradition. Les destructions du 1er janvier 1262 sont probables, lorsque Walter de Geroldseck, évêque de Strasbourg, fait ravager les territoires des Habsbourg. On peut supposer que le bourg souffre également en 1374 lorsque le duc Jean de Lorraine se venge des incursions menées par les Müllenheim de Strasbourg, alors engagistes de l’Albrechtstal. On peut également imaginer que les Armagnacs (les « Schinder », écorcheurs) s’intéressent aux richesses du bourg lors de leurs incursions de l’hiver 1444-1445.

 

Placé sur la route directe reliant l’Alsace à la Lorraine, Villé voit le passage des troupes bourguignonnes de Pierre de Hagenbach (1470) et, en 1525, de l’armée d’Antoine de Lorraine. Celui-ci campe entre le bourg déserté par ses habitants et les ruines de Honcourt, au retour de la bataille de Scherwiller (20 mai 1525) où il écrase les paysans révoltés réunis sous la bannière du « Bundschuh ». Villé est d’ailleurs condamné l’année suivante à Ensisheim pour sa participation au sac de Honcourt.

 

Comme pour le reste de la vallée, la Guerre de Trente Ans est certainement source de dévastations, en particulier lors du passage des « Suédois » en mai 1633. C’est en 1648 que Villé et la seigneurie autrichienne de la vallée passent à la couronne de France. Ce sont successivement Conrad de Zurlauben (1681) et son héritier Henri-Louis de Choiseul-Meuse (1711) qui administrent la seigneurie ; ils possèdent une résidence au bourg (ancienne maison Stemm/Lacoste). Les belles demeures de Villé datent de cette époque.

 

 

La Révolution marque la fin de l’ordre seigneurial. La municipalité est instituée le 22 décembre 1789. On élit un maire, un procureur, cinq fonctionnaires municipaux et douze notables. L’église, reconstruite peu avant, est même coiffée d’un bonnet phrygien en tôle sur sa tour !

Lorsque le 1er Empire s’effondre, Villé connaît de nouveaux passages de troupes et l’occupation par les troupes alliées, autrichiennes en l’occurrence (1814-1816). Après la guerre de 1870 avec son cortège « d’optants » et de réfractaires, la fin du 19e siècle voit enfin une « modernisation » progressive du bourg : raccordement du chemin de fer (1891), construction de deux ateliers textiles relayés au début du 20e siècle par les premières usines, arrivée du télégraphe, de l’électricité.

 

Août 1914 : de violents combats entre armées française et allemande ont lieu au Klosterwald (cimetière militaire). La gare de Villé devient le point de départ de la « Lordonbahn » ou « tacot », voie ferrée étroite exclusivement militaire ravitaillant le front, alors fixé sur les crêtes, en hommes, vivres et matériel. Villé est libéré le 17 novembre 1918.

 

En juin 1940, après quelques combats, Villé tombe sous le joug nazi et abrite la nouvelle hiérarchie politique et administrative de l’occupant. Des filières d’évasion vers la France (réseaux Sengler et Haubtmann) acheminent des centaines de prisonniers évadés, résistants ou réfractaires au-delà de la nouvelle frontière. La Libération s’annonce par un premier bombardement aérien sur le carrefour de la fontaine (Stockbrunna) ; plusieurs maisons sont endommagées ou détruites. Les combats des 26 et 27 novembre 1944 provoquent à nouveau d’importants dégâts, mais la liberté est de retour !

Survol historique de Villé (67)
Survol historique de Villé (67)
Survol historique de Villé (67)
Survol historique de Villé (67)
Graphie et étymologie

En alsacien : Willer.

 

Le nom du chef-lieu de canton est dérivé de villare qui désigne un domaine rural à l’époque franque.

 

La première mention du lieu, Wilre, est relevée dans une fausse charte du 13e siècle. On trouve également mention de Wilre in Valle Alberti (1241), Wihr (1303) dans le terrier des Habsbourg, Wihr encore en 1371, 1419 et 1464, Villiers en 1525, Weiler en 1633, Weyler en 1685, Weiller au 18e siècle, Weyller en 1793, Villé en 1870, Weiler pendant les périodes d’occupation allemande.

Le blason de Villé

Au 17e siècle, le blason de Villé représente un hameçon de piège à loup ; en attestent la ferrure de l’ancienne urne de vote de Villé ou des bornes sur lesquelles figure encore ce motif.

 

Les armoiries actuelles de Villé « De gueules à trois tours d’argent sur une terrasse de sinople » adoptées sous Louis XIV, représentent soit les fortifications du bourg, jadis flanquées de 9 tours, soit les 3 châteaux qui faisaient partie de la Seigneurie de Villé : le Bilstein lorrain, l’Ortenbourg et le Ramstein ; en effet, la vallée s’étendait de Saales à Scherwiller.

Le blason de Villé (67)
Commune de Villé (67)
Incohérences administratives

Villé est le chef-lieu de la Communauté de Communes aux vocations larges (les bureaux sont situés sur le ban de Bassemberg). Les sièges des services sont parfois inattendus : le SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale) et la Gendarmerie sont gérés à Sélestat, le Tribunal de Grande Instance est situé à Colmar, les services militaires, les « missions réseaux et infrastructures » (anciennement Equipement), la Sécurité Sociale et les Finances Publiques dirigés depuis Strasbourg, l’Office National des Forêts depuis Schirmeck, le SDEA (Service de l’Eau et de l’Assainissement) à Schiltigheim, le SDIS devenu le STIS (Service Territorial d’Incendie et de Secours) à Wolfisheim, le Pays de Noël (découpage géographique de l’Alsace pour les événements durant la période de l’Avent) dont Villé fait partie a son siège à Obernai … Et nous ne sommes pas à une incohérence près, puisque depuis 2015 Mutzig est devenu notre nouveau chef-lieu de canton.

Sobriquet

« Plàtteschlacker », lécheurs de plats.

 

On ne sait si ce surnom est dû à la gourmandise des Villois ou à la pauvreté de leur alimentation qui les condamnait à lécher le fond des écuelles.

 

En réalité, il s’agit de « Pletteschlacker », lécheurs de feuilles. Sur le marché du mercredi, les dames de Villé goûtaient le beurre entreposé sur une feuille afin de vérifier s’il n’était pas rance.

Sources (et pour plus d’informations) :

Le Val de Villé – Un pays, des hommes, une histoire (Société d’Histoire et Communauté de Communes du canton de Villé / Gyss Imprimeur Obernai, 4e trimestre 1995)

Villé Insolite – Histoire et anecdotes, réalisé par la Commune de Villé (conception graphique Atelier C – www.atelierc.com / impression : IDS Sélestat 2e trimestre 2019)

L’Ensemble Paroissial de Villé, Parcours du Patrimoine Alsace, réalisé par la Région Alsace, Service de l’Inventaire du Patrimoine, en partenariat avec la Direction régionale des affaires culturelles d’Alsace et la commune de Villé (Lieux Dits Editions Lyon, Novembre 2013)

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